À Anne Franck, Simone Weil, Françoise Héritier, Patti Smith, George Sand, Simone de Beauvoir, Louise Weiss Maya Angelou, Angela Davis, Françoise Dolto, Greta Thunberg, Malala Yousafzai.
Dans la mode comme dans de nombreuses professions, les figures féminines qui prennent la lumière se comptent sur les doigts de la main : Madame Grès, Coco Chanel, Jeanne Lanvin, Sonia Rykiel, ou les militantes Viviane Westwood et Stella McCartney. Les diktats restent de mise dans une profession pourtant essentiellement féminine. Force est de constater que l’histoire pèse. En 1675, Louis XIV permet aux couturières d’exercer librement leur profession pour les personnes du même sexe, avec quelques restrictions cependant : elles peuvent « vendre et faire des robes de chambre, jupes, corps de jupe, manteaux, hongrelines, justaucorps, camisoles, et toutes sortes d’ouvrages de toutes sortes d’étoffes pour habiller les femmes et les filles, à la réserve cependant de la robe et du vêtement de dessus qui, de même que le corset, restent le monopole du tailleur. » (Source : article d’Anne-Françoise Moyson paru dans Le Vif Weekend, « Haute couture : les femmes créatrices, trop souvent oubliées de l’histoire », janvier 2017) Et pourtant, ce sont bien les femmes qui portent la culotte, souvent ancrées dans le concret, détentrices de savoir-faire parfois ancestraux et ouvertes aux questions si cruciales d’identité.
Épouses, mères, jeunes filles, maîtresses, compagnes, elles sont souvent, quelques soient leur statut ou leur notoriété, le dernier bastion contre la barbarie, les injustices, la bêtise, le conservatisme. Parce qu’elles donnent vie ou transmettent, elles ont l’instinct de survie et savent que tout est fugace. « Les femmes libres ne sont pas des femmes » disait Colette. Cette citation semble plus que jamais d’actualité. Si en 2020, beaucoup de barrières sont tombées, notre planète et ses habitants sont aux abois et les femmes sont aux rangs des plus fragiles. Violences sexuelles, apologie des relations sexuelles avec des jeunes filles, discriminations en matière d’emploi et d’investissement, violences morales ou conjugales, droits des travailleuses bafoués, isolement, communautarisme, esclavagisme, accès tronqué à l’éducation…
À un niveau plus insidieux, alors que l’empowerment au féminin est sur toutes les lèvres, les préjugés et le sexisme ordinaire sont encore omniprésents dans un monde où les inégalités sont de plus en plus importantes, renforcées par la destruction de la Terre et l’épuisement des ressources naturelles. Face à cet écocide sans précédent, les femmes sont souvent aux avant-postes pour faire corps avec la planète et s’élever par leurs actions contre l’absurdité et l’abus de pouvoir afin de faire bouger les lignes. Une des armes dans ce changement de paradigme est la création, comme l’a montré ce deuxième numéro de Hummade avec ses portraits de femmes magnifiques qui changent concrètement les choses avec ce qu’elles créent. Les femmes sont les premières à avoir ouvert la brèche d’une mode plus juste et respectueuse de l’humain et de son environnement. Elles sont aussi celles qui dessinent les contours d’un autre monde.
Arielle Lévy, Fondatrice d’Une Autre Mode Est Possible